Le Droit de Préemption et/ou de Préférence :
Maître existe-t-il une liberté totale dans la vente d’un bien : puis je vendre à qui je veux ?
La liberté s’efface là où l’Etat veut réglementer et favoriser certaines situations.
Et ces situations… sont de plus en plus nombreuses :
« La proliférations des normes, obligations, a tué la démocratie, les administrations, les contraintes règnent comme au temps des monarchies. » Ancien ministre du budget Alain LAMBERT
Le » droit de préemption » est l’avantage qui est donné à quelqu’un, soit par la loi soit par une disposition contractuelle, de pouvoir se substituer à l’acquéreur d’un droit ou d’un bien pour en faire l’acquisition à sa place et dans les mêmes conditions que ce dernier.
C’est votre bien mais vous ne pouvez pas le vendre a qui vous voulez : « liberté … »
Le droit de préemption des personnes publiques :
Le droit de préemption est un droit privilégié permettant à une personne publique de se porter acquéreur prioritaire d’un bien mis en vente, mais suivant un prix arbitré par la juridiction de l’expropriation.
Le plus souvent ce sont les communes qui exercent un droit de préemption lorsqu’un propriétaire décide de vendre son bien. Encore faut-il que ce droit soit justifié par un projet d’intérêt général et qu’il s’exerce dans des zones délimitées préalablement.
Mais le gros inconvénient du droit de préemption apparaît lorsque la commune propose un prix inférieur à celui souhaité par le vendeur et c’est pratiquement toujours le cas.
Si la commune persiste dans son offre, et que le vendeur refuse sa proposition, la commune doit alors saisir le juge de l’expropriation du Tribunal de Grande Instance.
Les droits de préemption sont de plusieurs types selon les zones ou les espaces à protéger ou à aménager.
- Le Droit de préemption urbain (DPU)
Le Droit de Préemption Urbain (DPU) s’applique en zones urbaines et en zones à urbaniser du PLU (le Plan Local d’Urbanisme) qui a remplacé le POS (Plan d’Occupation des Sols) pour des projets urbains, des politiques locales d’habitat, des activités économiques, des loisirs, le tourisme, des équipements collectifs ou encore la constitution de réserves foncières. Le DPU peut jouer également dans les périmètres de sauvegarde de quartiers et d’ensembles urbains présentant un intérêt esthétique ou historique.
Il s’applique aussi dans les zones d’exposition aux risques des plans de prévention des risques technologiques et dans les zones de servitudes de prévention des inondations ; ce DPU concerne donc d’importants espaces agricoles et naturels. Il s’applique également dans les périmètres de protection rapprochés des captages d’eau potable donc dans des zones souvent naturelles (agricoles et forestières), de constitution de réserves foncières… donc sur des territoires naturels (agricoles et forestiers).
- Le droit de préemption dans les Zones d’aménagement différé (ZAD)
Ce droit de préemption s’applique dans les Zones d’Aménagement Différé. Ces ZAD permettent de constituer des réserves foncières dans des zones urbaines ou naturelles. Ce droit de préemption est autorisé par le préfet. Ce droit de préemption ZAD prime sur le droit de préemption urbain. Il est attribué à une collectivité publique. En cas d’évaluation des biens par le juge de l’expropriation, les valeurs foncières sont fixées à leur valeur un an avant la publication de l’acte délimitant le périmètre provisoire de la ZAD.
- Le droit de préemption dans les espaces naturels sensibles
Ce droit de préemption appartient aux Conseils généraux et au Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres. Il s’applique largement sur des espaces naturels. Les zones doivent répondre à la notion “d’espaces naturels sensibles“. Les biens acquis (du moins par les départements) doivent être ouverts au public.
Le droit de préemption de la SAFER
Les terrains préemptables sont les terrains à vocation agricole. Le champ d’application est très large… En effet, La loi ne dit pas que les terrains préemptables sont affectés mais sont à vocation agricole… ce qui ouvre biens des perspectives pour la SAFER.
SAFER (Société d’Aménagement Foncier et d’Etablissement Rural ).
Le droit de préemption de la SAFER est un droit de préemption privé. Tous les droits de préemption publics sont prioritaires par rapport à la SAFER (Articles L 143-6 et R 143-7 CR). Si un droit de préemption prime celui de la SAFER, le notaire doit informer la SAFER de l’existence des droits prioritaires et lorsqu’il connait la réponse de l’organisme prioritaire, il doit en informer la SAFER.
Et en matière de logement quand est-il ?
Le droit de préemption du locataire en place (bail d’habitation)
Lorsqu’un bailleur cède le logement occupé par un locataire, ce dernier peut disposer d’un droit de préemption s’il s’agit d’une volonté de vendre le logement avant la fin du bail et libre d’occupation.
Légalement, le congé vaut offre de vente et il doit donc mentionner le prix demandé ainsi que les conditions générales de la transaction. Le locataire dispose alors de deux mois pour accepter l’offre et deux mois pour passer l’acte de vente (quatre si il a recours à un emprunt).
le locataire est prioritaire pour acquérir le logement au prix demandé et deviendra propriétaire s’il le souhaite et s’il peut se le permettre financièrement.
Mais existe-t-il des limites à ce droit de préemption ?
Il existe des limites qui sont : en cas de vente entre personnes d’une même famille, en cas d’immeuble vétuste, en cas de location meublée ou de courte durée.
Ainsi, à part les exceptions ci-dessus, les différents cas de figure que l’on rencontre sont :
Le locataire dispose d’une priorité pour devenir propriétaire du logement qu’il occupe dans les situations suivantes :
– Le bail prend fin et le bailleur délivre un congé pour vente au locataire au moins six mois avant l’expiration du contrat de location ;
– L’appartement est vendu pour la première fois après la division de tout ou partie de l’immeuble en plusieurs lots ;
– L’immeuble est vendu dans son intégralité (vente en bloc) en une seule fois. L’immeuble doit abriter au moins cinq logements : le locataire dispose de quatre mois pour faire connaître son choix. S’il accepte la proposition, il devient propriétaire dans un délai de quatre mois maximum et le vendeur ne peut pas refuser la transaction. En cas de refus, il peut rester locataire jusqu’à l’expiration de son bail.
– Le propriétaire personne morale (une entreprise par exemple) vend plus de dix logements dans un même immeuble.
Existe-t-il d’autres droits de préemption et donc d’entraves à la liberté de vendre à qui on veut ?
Oui, en effet, il existe de nombreux cas et notamment sans être exhaustif :
Le droit de préemption en matière de vente de fonds de commerce ou de cession de droit au bail
-Toute cession de fonds artisanaux, de fonds de commerce ou de baux commerciaux intervenant dans le périmètre de sauvegarde du commerce de proximité, délimité par délibération du conseil municipal, peut faire l’objet d’un droit de préemption de la commune ou d’un établissement public de coopération intercommunale (EPCI), c’est-à-dire du droit de l’acheter en priorité pour le rétrocéder à un commerçant ou un artisan.
– Le locataire à bail commercial bénéficie désormais d’un droit de préemption.
Dans les sociétés à responsabilité limitée,
Le droit de préemption (encore appelée droit de préférence) est le droit d’acquérir par priorité les actions ou parts d’un associé qui souhaite sortir de la société.
Le bénéficiaire du droit de préemption peut être :
un ou plusieurs associés nommément désignés (ou catégorie d’associés)
tous les associés de la société (auquel cas, ils disposeront du droit d’acquérir une fraction de la participation de l’associé cédant calculée par rapport à la participation de chacun d’eux)
un tiers à la société.
Dans la vente d’entreprise,
L’opération doit concerner la vente :
D’un fonds de commerce, ou d’une participation représentant plus de 50 % des parts sociales d’une société à responsabilité limitée ou, le cas échéant, d’actions ou valeurs mobilières dont le bloc donne accès à la majorité du capital d’une société par action.
Dans ces entreprises, la réalisation de la vente ne peut intervenir avant un délai de deux mois, après que tous les salariés ont été informés de l’intention du propriétaire de vendre le fonds ou ses parts sociales.
En matière de vente d’objets d’art, l’article 37 de la loi du 31 décembre 1921 portant fixation du budget général de l’exercice 1922 a fixé les règles portant sur le droit de préemption de l’État sur les oeuvres d’art vendues aux enchères publiques. Le texte modifié par la loi n°2000-642 du 10 juillet 2000 dispose que « L’État peut exercer, sur toute vente publique d’oeuvres d’art ou sur toute vente de gré à gré d’oeuvres d’art réalisée dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l’article 9 de la loi no 2000-642 du 10 juillet 2000 portant réglementation des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques, un droit de préemption par l’effet duquel il se trouve subrogé à l’adjudicataire ou à l’acheteur ».
Le droit de préemption du preneur en place (bail rural) :
Toute aliénation amiable ou judiciaire d’un bien rural faisant l’objet d’un bail ou d’une location verbale donne ouverture au droit de préemption de l’exploitant preneur en place. En revanche, ces dispositions ne sont pas applicables s’il s’agit de biens dont l’aliénation, faite en vertu soit d’actes de partage intervenant amiablement entre cohéritiers, soit de partage d’ascendants, soit de mutations, profite à des parents ou alliés du propriétaire jusqu’au troisième degré inclus et sauf dans ces mêmes cas si l’exploitant preneur en place est lui-même parent ou allié du propriétaire jusqu’au même degré. La notification du projet de vente faite par le preneur qui n’est pas parent ou allié du propriétaire ne permet pas à ce dernier de bénéficier du droit de préemption que la Loi ne lui accorde pas. (3ème Chambre civile 12 octobre 2011, pourvoi n°10-19285, BICC n°755 du 1er février 2012 et Legifrance)
Tout acte autre qu’une vente ne donne pas ouverture au droit de préemption. Sont donc exclus l’échange, l’apport en société, la donation, la donation-partage, le partage. La vente intervenant entre parents et alliés jusqu’au 3ème degré (neveu et nièce) ne donne pas ouverture au droit de préemption.
Le bénéficiaire du droit de préemption peut exercer personnellement ce droit soit pour exploiter lui-même, soit pour faire assurer l’exploitation par un descendant ; « subroger » dans l’exercice de ce droit un descendant majeur ou mineur émancipé.
Le bénéficiaire du droit de préemption (ou son descendant) doit justifier de l’existence d’un bail soumis au statut du fermage et exploiter le fonds mis en vente ; avoir exercé la profession agricole pendant trois années au moins, ne pas être déjà propriétaire d’une superficie définie par arrêté préfectoral.
Peut on éviter ces droits de préemption ?
Il faut savoir que chaque cas est particulier.
Le droit est fait pour favoriser certaines situations sociales et chaque dossier est différent et doit être analysé complètement.
L’avocat est nécessaire dès le début et avant toute signature pour trouver, lorsque cela est possible, une solution de sortie.
Information juridique générale ne remplaçant pas une consultation d’un avocat avec tous les documents nécessaires et plus adapté au cas particulier
A jour au 31 mai 2018 http://www.avocat-bernardi.fr